Sois beau•elle et surtout ferme bien ta gueule !

Corée du Sud 5 Minutes

Depuis son apparition en 1960 (ouverture de la première clinique spécialisée) en Corée du Sud, la chirurgie esthétique se banalise de plus en plus chez les coréen•nes. Les injonctions à la beauté sont très présentes dans la société et les pubs pour des opérations chirurgicales sont monnaie courante dans la rue ou dans les transports en commun car contrairement à la France, il est parfaitement légal pour les “médecins” de publiciser ses activités en Corée du Sud.

Dans les opérations les plus fréquentes, on retrouve le débridage des yeux, la rhinoplastie, le rabotage des mâchoires, le remplissage du visage à base de graisse, mais aussi le botox et l’augmentation mammaire. Bien évidemment la liste est aussi longue que les complexes des coréen•nes. Par ailleurs, il est courant de combiner plusieurs opérations. Les chirurgiens proposent régulièrement à leurs patients leurs vaches à lait à l’occasion d’une opération nécessaire (par exemple, une extraction de dents de sagesse) de se faire raboter la mâchoire au passage.

L’influence des chanteur•ses de k-pop (pop coréenne) est très forte en particulier chez les jeunes. En effet, là où le pourcentage général de femmes ayant eu recours à la chirurgie esthétique est de 20%, il grimpe carrément à 60% quand on parle des moins de 30 ans.

Il n’est pas rare d’avoir sa première chirurgie à 18 ans voire 16 ans, en cadeau par les parents pour avoir bien travaillé à l’école ! Subir des cours particuliers à n’en plus finir pour avoir les meilleurs résultats possibles mais aussi des cours particuliers pour apprendre à jouer d’instrument de musique ou pour apprendre l’anglais ne suffisent pas, il faut également être beau•elle. Tout ça n’est souvent vu que comme un investissement pour avoir un “bon” emploi. A compétences égales, l’employeur choisira le plus beau d’autant plus qu’il est obligatoire de joindre une photo à son CV. On triche aussi souvent sur son âge puisque les annonces ont régulièrement des âges limites, surtout pour les postes où l’on recherche des femmes. Bah, voyons !

Il est apparemment possible de se pointer dans une clinique, d’ouvrir leur catalogue de célébrités et de choisir à laquelle l’on souhaite ressembler. Selon la carrière voulue désirée sélectionnée, les jeunes gens sont libres de choisir vivement enjoints à subir le ravalement de façade qu’ils souhaitent que leur futur employeur esclavagiste veut pour eux. Ainsi, Korean Air préfère les yeux ronds et assez larges alors que d’autres compagnies aériennes auront d’autres critères. À bon entendeur.

Il est vrai que les injonctions à la beauté sont également dirigées vers les hommes, mais la cible privilégiée reste malgré toute la gent féminine.

Pour les femmes, la chirurgie esthétique permet également d’espérer un meilleur mari, ou au moins un mec pété de thunes. Même si les études sont valorisées pour les femmes, pas question de poursuivre sa carrière après une grossesse. Effectivement, comme au Japon, les mentalités à l’égard des femmes sont plutôt rétrogrades. La femme reste à la maison pour n’être qu’une mère au foyer tandis que l’homme trime comme un gros malade parfois enchaînant les nuits au bureau. Loin de moins de juger une femme désirant s’occuper de sa famille et rester chez elle, mais ça devrait être un choix pas une obligation.

Voilà au fond le triste sort des jeunes coréen•nes. Beaucoup ont conscience que les choses clochent, par contre, pas question de faire de vague alors on subit sans moufter. D’ailleurs, le taux de suicide en Corée du Sud est le plus élevé au monde, bien supérieur à celui du Japon ! Ne parlons même du taux de suicide après les opérations de chirurgie esthétique qui crève aussi le plafond…

Sois beau•elle coûte que coûte.

Au bout du compte, personne n’évoque le traumatisme évident de se réveiller après une opération et de voir son visage méconnaissable ! Ne pas se reconnaître dans la glace et continuer à apercevoir ces pubs culpabilisantes pour les cliniques.

D’ailleurs, le nombre de plaintes contre ces pubs a clairement augmenté auprès des services publics. Comme quoi, tout le monde n’est pas complètement lobotomisé•e mais je me doute que ces plaintes émanent principalement de groupes d’activistes, comme chez nous. Dans tous les cas, la mairie de Séoul a décidé d’agir, de réduire la publicité de 15% et surtout d’interdire toutes publicités de chirurgie esthétique dans les transports en commun. À la place, les espaces publicitaires promouvront les activités culturelles de la ville. En voilà, une idée qu’elle est bonne.

En 2012, le dessinateur Mind C a parodié la peinture “Portrait d’une beauté” (à droite) de Shin Yun-bok (1758-1813) représentant les canons de beauté de son époque. A gauche, la version moderne est intitulé “Portrait de la beauté de Gangnam”. Malgré un style général similaire, l’artiste dénonce les préoccupations qui portent sur la chirurgie esthétique et les produits de luxe (sac, lunettes et chaussures à talon).

Ce qui est curieux avec la chirurgie esthétique, c’est qu’elle s’est complètement banalisée alors qu’à côté de ça, avoir un style vestimentaire différent, ou pire avoir des tatouages est considéré comme mal. Les coréen•nes continuent d’obéir à de nombreux principes confucéens et là où traditionnellement effectuer des altérations sur le corps est banni, passer par la case chirurgie pour modifier complètement son apparence ne pose pas de problème. Les parents les plus conservateurs n’hésiteront pas à renier leur enfant si l’envie leur vient de se faire tatouer, mais ils seront les premiers à leur payer un nouveau visage. Y’a pas à dire, c’est un drôle de paradoxe.

Il est courant chez nous de dire que tous les asiatiques se ressemblent car peu en contact avec ces populations, il est souvent difficile pour les occidentaux de les distinguer. Au passage, les asiatiques disent exactement la même chose des occidentaux ! C’est assez faux. D’un point de vue général, les asiatiques d’un pays à l’autre sont différents, par contre effectivement, d’un point de vue de l’individu, il est souvent difficile d’affirmer les origines des uns ou des autres.

Par contre, oui, les coréen•nes entre eux se ressemblent énormément entre eux et cela s’explique effectivement par ces fameux catalogues en clinique.

Sources :

Publié par domanifacciamotutto

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